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Aventures de césure
10 mai 2014

Mimi-Siku au Pérou

Après une trentaine d’heures de voyage, soit trois avions et deux heures de pirogue, j’arrive vers 18h heure locale dans la réserve Taricaya, il fait une nuit noire, on doit chercher le camp à la lampe torche sur le Madre de Dios. C’est un jour un peu spécial, avec soirée barbecue et alcool autorisé. En temps normal, l’alcool et les joints sont interdits dans la réserve. Mais bon, ça c’est la théorie.

L’accueil est chaleureux, on parle beaucoup plus anglais qu’espagnol.

Seul le robinet de la cuisine commune fournit de l’eau potable, petit détail qui m’a été révélé par hasard par une des volontaires bien après mon arrivée, heureusement avant l’erreur fatale et l’inéluctable tourista de bienvenue. L’air ambiant est très très humide, et la salle de bain (ou plutôt station de décrassage) couverte de boue me laisse présager des journées de pataugeage dans la gadoue.

Après une installation minutieuse de moustiquaire (certains volontaires sont complètement ravagés par les piqûres), gros dodo en attendant mes premières activités utiles du lendemain.

Et effectivement, ma première journée s’est déroulée sous une pluie constante. Le matin, avec deux autres volontaires et un membre du staff, construction d’une nouvelle « aire de jeu » pour les singes araignées, après destruction de l’actuelle : il faut qu’ils aient plusieurs niveaux de supports dans leur cage pour pouvoir retrouver au maximum ce qu’ils ont dans la nature, et bien développer leurs capacités à se mouvoir avant d’être relâchés, surtout pour les bébés. On part donc couper des grosses branches à la machette dans la forêt, on ramène ça dans la cage puis on fixe les branches entre elles avec des ficelles après un apprentissage rapide des nœuds à réaliser. J’imagine que si on fait régulièrement un nouvel agencement de branchages, c’est pour ne pas qu’ils s’habituent trop à une certaine disposition et qu’ils perdent leur faculté d’adaptation.

L’après-midi : animal feeding. On prépare minutieusement le repas des nombreux animaux de la réserve : singes araignées, singes hurleurs et plein d’autres primates dont je n’ai pas encore retenu le nom, tapirs, grosses oies noires, bébé fourmilier, bébé félin mignon à croquer, espèce de renard bizarre dont le nom m’est inconnu ... Il faut donc pour cela suivre une fiche pour chaque espèce, qui détaille le menu du matin et celui de l’après midi : poids de chaque type de fruit / légume et façon de les couper. C’est particulièrement frustrant de couper des oranges juteuses, bananes mûres à point, papayes, carottes etc quand on n’a droit pour nos repas qu’à une assiette de pâtes ou de riz. J’ai bien l’intention ce weekend de remédier à ça au marché de Puerto Maldonado. Après pesée et découpage des aliments, il faut les apporter dans chaque cage. Pour certains il n’y a aucun risque à entrer dans la cage, il ne faut juste pas avoir peur de se faire grimper dessus par 4 singes en même temps, perso j’ai trouvé ça bien marrant. Donc ça c’est les gentils, et puis il y a les autres. Les félins par exemple, ils ont des systèmes de double cage, histoire d’éviter les petits accidents. En même temps, on peut comprendre qu’un humain bien vivant puisse être plus appétissant qu’une assiette de viande, pourtant préparée avec amour. Un peu plus compliqué : dans une même cage, un groupe de singes avec un mâle très dominant. Il faut les nourrir en deux fois en isolant d’abord le dominant puis en le laissant à nouveau avec les autres. Autrement, certains ne mangeraient jamais ... Ce mâle est très agressif d’ailleurs, un homme qui rentrerait dans sa cage se ferait déchiqueter si j’ai bien compris. Les femmes seraient mieux tolérées.

Quasiment tous les animaux en cages seront relâchés quand ils seront guéris ou assez grands pour se débrouiller seuls, dans le cas des bébés sans parents recueillis ici. Quelques uns  sont dans un sale état, je pense en particulier à un singe qui n’a plus qu’un œil et est couvert de cicatrices : il a été brutalisé à la machette par un/e sombre abruti/e.

Nous sommes quand même des animaux bien perturbés, à prendre autant plaisir à faire souffrir d’autres êtres vivants.

Pour revenir à un peu plus de légèreté, je loge dans un des dix bungalows du camp, chacun a quatre lits.  J’y ai dormi seule la première nuit, puis une Irlandaise très sympa qui reste aussi 3 mois m’a rejoint et il sera très vite rempli je crois. Il règne dans le camp une ambiance de colonie de vacances, et ça c’est top !

Le matin du deuxième jour, je participe à une expédition en bateau pour aller chercher des graviers, mains calleuses garanties à la fin du pelletage. Sous 34 degrés, l’expression « I sweat like a pig » fuse de tous les côtés. L’après midi : peinture de l’intérieur d’un bungalow. En Février, une énorme inondation a rempli tous les bungalows d’une épaisse couche de boue et a détérioré par mal de matériel, il y a donc de la remise en état à faire. Plusieurs animaux ont été perdus pendant cet épisode, le niveau de l’eau ayant dépassé celui des enclos ils ont pu nager loin loin loin.

Troisième jour et dernier de la semaine, je passe ma matinée à nettoyer un certain nombre de cages : désinfecter des plateformes où la nourriture est posée, changer l’eau des abreuvoirs et petites « piscines », et bien sûr ramasser la merde de toutes ces charmantes créatures (je n’ai pas trouvé de façon poétique de le dire). L’après-midi, j’ai eu l’honneur de nourrir madame puma et monsieur jaguar. Un seul repas par semaine pour ces gros matous, autant dire que ça fait un bon paquet de barbaque. Pour rendre tout ça un tantinet plus intéressant pour eux, on ne met pas juste un gros tas de viande au milieu de la cage, mais on répartit les morceaux dans les endroits les plus inaccessibles, emballés dans des feuilles ou dans des cartons solidement fermés et suspendus un peu partout. C’est plutôt rigolo, j’avais l’impression d’organiser une petite chasse au trésor. Avec mes collègues, on s’est ensuite improvisées décoratrices d’intérieur en fixant des branches de différentes espèces d’arbres un peu partout, pour que les félins soient en contact avec différentes odeurs de végétaux. Le jaguar sera relâché un jour mais pas le puma (ou le contraire, je ne sais plus trop ...), car il a été utilisé comme animal de compagnie pendant ses premières années. Il a maintenant un comportement anormal envers les humains : il ne s’enfuirait pas s’il en voyait en pleine jungle. S’il était relâché et qu’il attaquait un humain, le centre Taricaya en serait responsable. Il restera donc là jusqu’à la fin de ses jours ... Bref, après avoir préparé de superbes cages garnies de paquets sanguinolents, c’est parti pour la partie la plus cool : les regarder découvrir tout ça et se déchaîner sur les cartons bien ficelés. Ca calme un peu de savoir qu’il y en a en pleine nature pas très loin de la réserve. On termine la journée par un petit cours de Raul (membre du staff) sur les primates. Et voilà, une demi-semaine d’adaptation bien remplie ! Il est temps maintenant de profiter du weekend, qui sera raconté dans le prochain épisode. :) J’oubliais, un truc vraiment chouette à Taricaya : il y a des papillons partout ! J’essaierai de faire un petit shooting photo bientôt. Des bisous chauds et humides à tous ! 

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Commentaires
M
coucou Maïté, c'est une année incroyable que tu vis, tu auras du mal de faire mieux !<br /> <br /> <br /> <br /> bisous
L
On a déjà hâte d'être à la suite.... Quelle aventure !!
L
Super Maïté!! C est délicieux de lire tes aventures! Bisous pluvieux de london !!!
G
Je plains les pauvres gens bouffés par les moustiques tropicaux. Hâte de voir les photos de papillon !
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